SCIENCES DE LA SOCIÉTÉ
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N° 70 - février 2007
Femmes
et médias
Le 8 mars à la "une"
Une
comparaison internationale
Dossier
coordonné par Marlène
COULOMB-GULLY et Simone BONNAFOUS
Marlène COULOMB-GULLY, Aux "unes", citoyennes ! Introduction
à une comparaison internationale de la médiatisation
du 8 mars [texte intégral]
Claire BLANDIN,
Géographies
médiatiques... et droits des femmes
Sheila PERRY, Pamela M. MOORES, International Women's Day : réticences au Royaume-Uni
Danièle TORCK,
Entre indifférence et tradition. Réflexions
sur quelques instantanés du 8 mars 2005 dans le médias
des Pays-Bas
Dominique DESMARCHELIER, Le 8 mars dans la presse suisse romande. Entre dérision
et dénonciation des inégalités
Simone BONNAFOUS, Marlène COULOMB-GULLY, La Journée internationale des femmes en France.
Entre marronnier et foulard islamique
Nadine CELOTTI, Pascale JANOT, L'Otto marzo italien et le mimosa. Une fête ritualisée
au service du politique et de la consommation
Lydia FERNANDEZ, Montserrat RIBAS, Espagne : le nouveau pouvoir des femmes
Camelia BECIU, Valentina MARINESCU, Le 8 mars roumain : un concept publicitaire
Lucyna KOPCIEWICZ,
Oeillet rouge et tulipe rouge. La forte polarisation
idéologique du 8 mars en Pologne
Josette BRUN, Barbara M. FREEMAN, L'après-8
mars au Canada anglais et au Québec. Une célébration
contrastée
Carolyn M. BYERLY, Danna L. WALKER, L'invisible commémoration de la Journée
internationale des femmes dans les médias américains
Marlène COULOMB-GULLY, Aux
"unes", citoyennes ! Introduction à une comparaison
internationale de la médiatisation du 8 mars
Texte
intégral
En 1977, le vote de la déclaration 32/142 de l'ONU invite
« tous les États à proclamer, comme il conviendra
en fonction de leurs traditions et coutumes historiques et nationales,
un jour de l'année Journée des Nations unies pour
les droits de la femme et la paix internationale ». Ce vote
eut lieu soixante-sept ans après le Congrès de la
seconde Internationale socialiste de 1910, où fut évoquée
officiellement pour la première fois, l'idée d'une
journée des femmes qui serait célébrée
partout dans le monde.
Quinze ans après l'effondrement des pays communistes, alors
qu'une forme militante du féminisme reflue en Europe comme
en Amérique du Nord et que la situation des femmes s'est
dégradée dans de nombreux pays sous l'effet de poussées
religieuses intégristes, qu'en est-il aujourd'hui de la
célébration du 8 mars dans le monde ? Quel rôle
les médias, dont on sait la place centrale dans l'espace
public contemporain - en tout cas dans l'ensemble des pays ici
pris en compte -, jouent-ils dans la « publicisation »
de cette journée symbolique ? Pour répondre au moins
partiellement à cette question, nous avons constitué
un réseau international de chercheurs et chercheuses en
sciences humaines et sociales qui ont étudié la
façon dont a été médiatisé
le 8 mars 2005 dans dix pays d'Europe et d'Amérique du
Nord. Notre objectif est double : d'une part, l'étude des
formes de médiatisation proprement dites, et d'autre part,
l'étude des représentations des femmes et de leur
rôle dans la société à travers les
prises de paroles, les mises en images et plus globalement les
mises en scènes multiples et diversifiées auxquelles
cette journée donne lieu.
Notre perspective est originale à plusieurs titres. D'abord,
bien sûr, par le choix de l'événement, la
Journée internationale des femmes et sa médiatisation,
qui devrait nous permettre de contribuer à l'importante
question du traitement médiatique des femmes dans la société
contemporaine ; par la dimension internationale de notre étude
et la volonté subséquente de réfléchir,
à travers cet exemple, sur ce qu'est une « Journée
internationale » à l'échelon national, sujet
sur lequel, à notre connaissance, rien n'a été
publié à ce jour ; par le choix du 8 mars 2005 comme
événement source commun à tous les pays étudiés
et par la systématicité d'une approche commune à
tous les participants de cette recherche. Deux choix qui, nous
l'espérons, donnent à cette comparaison une rigueur
qui manque parfois à ce genre d'entreprise ; par l'importance
accordée à la question de la médiatisation
et du discours enfin. La plupart des études sur les «
représentations des femmes dans les médias »
ou sur la « place des femmes dans les médias »
l'ont été dans une perspective de sociologie ou
de science politique et relèvent méthodologiquement
de l'analyse de contenu. C'est le cas en particulier de la grande
enquête canadienne intitulée « Global Media
Monitoring Project » et destinée à repérer
plusieurs sortes de discriminations (sexuelles, racistes, ethniques,
religieuses, etc.). Or, comme nous le préciserons plus
loin dans la présentation de notre problématique
et de notre méthodologie, nous souhaitons enrichir les
approches sociologiques, politiques et historiques de ce sujet
par une méthodologie qui croise les apports des sciences
de l'information et de la communication et de l'analyse du discours,
de façon à pouvoir rendre compte de la spécificité
des dispositifs et discours médiatiques.
La Journée internationale des femmes
Sans entrer dans le détail de la passionnante histoire
des origines supposées de la Journée internationale
des femmes - quelques articles et ouvrages tentent de faire
le point sur cette question -, rappelons-en néanmoins les
grandes lignes.
L'histoire du 8 mars est complexe et avant tout révélatrice
des enjeux politiques qui entourent la question des femmes.
D'une part en effet, il n'y a pas d'accord sur le ou les événements
que pourrait commémorer le 8 mars, si tant est que cette
date commémore un événement, et d'autre part,
les différentes déclarations qui instituent la Journée
internationale des femmes (ou de « la femme ») sont
toutes plus difficiles à trouver les unes que les autres.
Comme l'indique Simone Bonnafous (2006), trois versions principales
se partagent l'interprétation des origines de la JIDF.
La version communiste d'avant Guerre fait état d'une grande
manifestation des ouvrières de Pétrograd le 8 mars
1917, par ailleurs premier jour de la Révolution soviétique,
dans une parfaite symbiose des luttes des femmes, du communisme
et de la révolution. Durant la Guerre froide, prévaut
une autre version, selon laquelle Clara Zetkin, dirigeante social-démocrate
allemande, aurait proposé de commémorer à
travers le 8 mars, une manifestation de chemisières ou
de couturières qui aurait eu lieu à New-York en
1857. Clairement ancrée dans une vision ouvriériste
de la lutte des classes, cette version présente en outre
l'avantage d'une naissance spontanée, en Amérique,
en-dehors de tout appareil politique et notamment communiste Une
troisième version se fait jour dans les années 1980
; fondée sur le constat que le premier Woman's Day officiel
a eu lieu aux États-Unis en 1909, elle valorise les luttes
féministes au sein du socialisme américain.
Ajoutons pour clôturer cette rapide présentation,
que les différentes déclarations qui instituent
la JIDF sont extrêmement difficiles à trouver, la
seule que l'on puisse aisément se procurer étant
celle de l'onu, adoptée en 1977, mais jamais citée
dans le texte. Le 16 décembre 1977 en effet, l'onu adopte
un texte intitulé « La journée des Nations
Unies pour les droits de la femme et la paix internationale »
; la surprise réside ici dans le fait que ce texte parle
beaucoup plus, comme l'indique Simone Bonnafous, de « racisme
» (elle relève six occurrences), de « discriminations
raciales » (six occurrences), d'« apartheid »
(deux occurrences), de « colonialisme » (cinq occurrences)
et de « paix » (six occurrences) que des discriminations
spécifiques envers les femmes (une occurrence) ou des droits
des femmes (une occurrence). Les femmes ne seraient donc ici que
le prétexte à des causes plus générales
Quoi qu'il en soit, c'est cette résolution 32/142 de l'ONU,
difficilement adoptée le 16 décembre 1977, qui a
officialisé dans un certain nombre de pays la célébration
du 8 mars.
La situation des divers pays pris en compte dans notre étude
est très variable quant à leur positionnement face
à la JIDF. Pour certains d'entre eux, comme le Royaume-Uni,
les Pays-Bas ou le Canada, la JIDF ne bénéficie
pas d'un statut officiel et son impact semble donc particulièrement
faible dans la société et les médias en particulier.
En dépit d'une absence de reconnaissance institutionnelle,
elle est cependant assez populaire dans des pays comme l'Espagne
- où elle est officiellement reconnue dans certaines provinces
autonomes - ou en Italie où elle est fêtée
depuis la Première guerre mondiale. La France en 1982,
après l'arrivée de la gauche et de François
Mitterrand au pouvoir, les États-Unis à l'initiative
de Jimmy Carter en 1980 et en 1987 par un vote au Congrès,
décident de leur côté d'officialiser cette
Journée. Les ex-pays de l'Est enfin, n'ont pas attendu
la déclaration de l'onu en 1977 pour célébrer
le 8 mars, prétexte à des exercices de glorification
du système et des femmes communistes, cet héritage
pesant négativement sur le statut de la JIDF aujourd'hui.
Signalons aussi que dans certains pays, le 8 mars est concurrencé
par d'autres événements mettant les femmes au premier
plan. Ainsi du Canada, où en 1989, l'assassinat parce qu'elles
étaient des femmes, de plusieurs étudiantes de l'École
polytechnique, donne lieu chaque année à des commémorations
importantes dans tout le pays (El Yamani, 1998). En Pologne, l'identification
du 8 mars à la propagande communiste explique qu'il soit
aujourd'hui délaissé par une grande partie de la
population qui lui préfère une fête comme
la Saint Valentin - le 14 février - ; tandis qu'en Roumanie,
le 8 mars apparaît comme un appendice à la traditionnelle
« Fête du printemps », célébrée
le 1er mars. Dans ces deux derniers cas, il s'agit de manifestations
commerciales, valorisant des images traditionnelles de la femme,
associée à l'amour et à la fécondité,
et bien loin des revendications politiques censées caractériser
la JIDF.
Choix des pays, choix des médias
Notre étude porte sur dix pays d'Europe occidentale,
d'Europe orientale et d'Amérique du Nord. Il s'agit, pour
les premiers, du Royaume-Uni, des Pays-Bas, de la Suisse francophone,
de la France, de l'Italie et de l'Espagne ; pour les seconds,
de la Roumanie et de la Pologne ; et pour les troisièmes,
du Canada (Québec et Canada anglophone) et des États-Unis.
Ces choix ne correspondent pas à un échantillonnage
qui se voudrait représentatif d'un ensemble plus large
; il s'agit de photographies, voire d'instantanés du 8
mars tels qu'en rendent compte les médias des pays en question.
Mais sans être parfaitement « représentatifs
», ceux-ci nous donnent néanmoins une idée
de la notoriété et de la légitimité
de la JIDF dans des zones culturelles différentes :
- l'Europe du Nord, où l'influence anglo-saxonne est
forte : la tradition d'émancipation et d'indépendance
des femmes - voir le mouvement des suffragettes en Angleterre
- y est bien ancrée, comme en témoignent une réelle
représentation politique et un taux d'activité professionnelle
relativement élevé. On peut supposer une certaine
proximité entre ces pays et l'Amérique du Nord,
pays du Women's Lib et du communautarisme, où la pression
des mouvements de femmes est importante - même si des influences
contraires se manifestent aujourd'hui - ;
- l'Europe du Sud, où les sociétés sont
plus patriarcales, voire marquées par le machisme, que
révèlent entre autres l'importance des violences
dont les femmes sont victimes et leur faible taux de représentation
dans les instances politiques ;
- et les ex-pays de l'Est, où la JIDF reste marquée
par la tradition communiste.
Le choix des médias analysés se veut en revanche
représentatif du paysage médiatique de chaque pays.
Si certains articles ne prennent en compte que la presse écrite
(Suisse, Canada), la plupart d'entre eux portent à la fois
sur la presse et la télévision, médias traditionnels
qui, dans les pays étudiés, continuent de cristalliser
l'audience la plus importante. L'étude sur les États-Unis
a aussi porté sur un journal d'information en ligne. En
clôture de cet ouvrage, figure une présentation détaillée
des données concernant tant le statut des femmes que celui
des médias dans les pays retenus.
Cadrage théorique et méthodologique
Précisons d'abord notre rapport aux études dites
de « genre », auxquelles il est bien sûr difficile
de ne pas faire référence lorsqu'on travaille sur
la médiatisation du 8 mars et la représentation
des femmes dans les médias. Nous faisons nôtre l'idée
selon laquelle « la situation des femmes n'est pas particulière,
elle est révélatrice » (Laufer, Marry, Maruani,
2001, 53) et que par conséquent, s'interroger sur la représentation
des femmes dans les médias permet d'opérer un décentrement
du regard dont bénéficie la compréhension
du social dans son ensemble, et en ce qui nous concerne, des médias
en particulier. Nous sommes en effet convaincue que revisiter
les logiques disciplinaires à la lumière de la variable
« genre » permet le renouvellement des problématiques,
comme le prouvent par exemple la fécondité des travaux
des jeunes politistes réunis dans le programme «
L'invention de l'élue » et les travaux d'histoire,
menés autour de G. Duby et M. Perrot (1991). Or l'analyse
des médias a longtemps occulté les rapports sociaux
de genre, en tout cas en Europe et dans l'aire francophone, où
ce n'est que récemment que ce champ de recherches s'est
développé, parfois dans l'ignorance des travaux
et des problématiques anglo-saxonnes et souvent au sein
d'institutions et de groupes d'intérêt extérieurs
au monde universitaire (Barre, Debras, Henry, Trancart, 1999).
Notons néanmoins que les recherches européennes
les plus récentes (Gallagher, Von Euler, 1997 ; Debras,
2003 ; Réseaux, 2003 ; MEI, 2004 ; Mots,
2005) sont convergentes avec celles du monde anglophone, et que
dans les deux espaces scientifiques, se développe une polémique
sur ce que certains dénoncent comme un pessimisme analytique
obstiné et injustifié des études de médias
s'inscrivant dans la perspective de genre (Gauntlett, 2002 ; Perret,
2003).
Mais si l'insertion dans les études de genre est pour nous
évidente, elle ne constitue pas notre cadre théorique
de référence. Travailler sur la médiatisation
du 8 mars et sur la représentation des femmes que cet événement
suscite, suppose en effet une théorie des représentations
et une théorie des médias dans l'espace public.
En ce qui concerne les « représentations »,
notion pluridisciplinaire s'il en est, nous adhérons au
point de vue de l'analyste du discours, pour qui « les représentations
se configurent en discours sociaux qui témoignent, les
uns d'un savoir de connaissance sur le monde, les autres d'un
savoir de croyance renfermant des systèmes de valeurs dont
se dotent les individus pour juger cette réalité.
Ces discours sociaux se configurent, soit de façon explicite,
soit de façon implicite, par allusion (comme dans le langage
publicitaire) » (Charaudeau, Maingueneau, 2002, 504). Cela
signifie que nous avons souhaité travailler non seulement
sur le dit et le montré, comme peut le faire l'analyse
de contenu quantitative, mais aussi sur le suggéré,
le sous-entendu, le présupposé. Nous nous sommes
également intéressés à toutes les
formes de figements représentationnels, comme le stéréotype,
l'emblématisation, la mythification, etc.
Analysant les représentations médiatiques, nous
avons par ailleurs essayé d'éviter trois écueils.
Celui de la démonisation des médias, au prétexte
que les représentations ne pourraient jamais être
« vraies ». Mais aussi ceux du tout positivisme ou
du tout constructivisme, aboutissant l'un à considérer
que les journalistes n'ont qu'à rendre compte le plus «
objectivement » possible d'un réel préexistant
pour remplir leur mission sociale, et l'autre que le réel
et les faits n'existeraient pas en dehors de leur construction
sociale.
Partant du principe selon lequel les médias participent
à une construction de la réalité qu'ils donnent
à percevoir, nous nous sommes attachés à
décrire et à analyser ces représentations
médiatiques, sans prétendre procéder au dévoilement
d'un réel caché par ces représentations.
Quand les acquis d'autres disciplines, comme la sociologie, l'histoire
ou les sciences politiques le permettent, nous avons établi
des comparaisons entre ces données et nos propres analyses.
Si les médias participent à une construction du
réel qu'ils donnent à voir, se pose alors la question
des choix en fonction desquels ce réel - médiatique
- est construit. La notion d'« agenda » initiée
par M. Mac Combs et D. Shaw (1972) constitue un outil intéressant
pour appréhender ce travail des médias. Nous référant
au seul agenda médiatique11, nous avons tenté en
un premier temps d'évaluer quelle visibilité les
médias attribuent à la JIDF, visibilité très
différente selon les médias et les pays étudiés.
Dans un sens plus large, la notion d'agenda renvoie aux attributs
et propriétés attachés aux objets mis en
lumière, en d'autres termes à la façon dont
les médias choisissent de traiter une question. A côté
de la priorité donnée par les médias à
un thème, c'est sa définition médiatique
qui est ainsi visée. On rejoint ainsi la notion de «
framing » ou « effet de cadrage » au sens goffmanien
du terme ou d'« agenda framing » tel que le
définit Iyengar (1999), renvoyant à l'interprétation
générale suggérée par le traitement
médiatique d'une question.
L'originalité de notre démarche consiste à
articuler ce cadrage théorique à une méthodologie
relevant de l'analyse de discours, ceci afin de dépasser
les outils parfois limités (notions de « cadrage
épisodique » et de « cadrage thématique
», cf. Iyengar, 1999) usuellement développés
dans ces études. Notre méthodologie d'approche des
textes médiatiques s'inspire donc directement des principes
et outils mis en uvre dans le cadre de l'analyse de discours et
tels qu'ils sont développés notamment par Maingueneau
(1998) et Wodak (2002). Nous avons donc été particulièrement
attentifs aux phénomènes énonciatifs en général
et tout particulièrement aux marques de modalisation (phénomènes
d'embrayage, jeu des pronoms personnels, modalités assertives,
appréciatives, adjectifs subjectifs, etc.) et aux phénomènes
de polyphonie énonciative (citations, intertexte, gloses,
paraphrases, etc.) ; en résumé, à tous les
éléments permettant de cerner la notion de responsabilité
énonciative.
Principaux résultats
Une couverture médiatique contrastée selon les pays
Le premier constat qui s'impose à la lecture de ces
analyses est le suivant : dans tous les pays ici considérés,
la JIDF a suscité de nombreuses manifestations sur le terrain,
principalement organisées à l'appel de mouvements
de femmes, de syndicats et de mouvements associatifs divers, parfois
rejoints par des partis ou des personnalités politiques
: nombreux sont en effet les membres des gouvernements, en charge
des questions relatives aux femmes et à la parité
notamment - mais pas seulement -, qui ont inscrit cette
journée dans leur agenda.
Mais l'attention que les médias accordent à ces
événements est très diverse selon les pays,
voire selon les médias : globalement faible aux États-Unis,
au Canada, au Royaume-Uni et aux Pays-Bas, comme en témoignent
les titres, éloquents, des articles portant sur la médiatisation
du 8 mars dans ces pays : « Réticences au Royaume-Uni
», « Pays-Bas : entre indifférence et tradition
», « États-Unis : une commémoration
invisible ». ; moyenne en Pologne, en France et en Suisse
et forte en Italie, en Espagne et en Roumanie. Ces clivages ne
recouvrent pas strictement les trois secteurs géographiques
a priori définis (Europe occidentale, Europe orientale
et Amérique du Nord). On observe en revanche une parenté
entre les pays anglo-saxons (Québec compris, même
si la couverture du 8 mars y est plus forte qu'au Canada anglais),
où la JIDF est peu médiatisée, alors même
que les femmes y sont assez bien représentées sur
le plan politique et/ou que leur taux d'activité professionnelle
est élevé et/ou qu'elles représentent des
forces de pression importantes. Cette apparente contradiction
inclinerait à établir un rapport de causalité
inverse entre la visibilité médiatique de la JIDF
et le statut des femmes : plus leur situation serait favorable,
moins cette journée aurait de raisons d'être.
La proximité entre la France et la Suisse francophone n'est
pas surprenante, et leur situation médiane appelle moins
de commentaires que la différence de traitement entre les
deux pays de l'ex-zone communiste. La réticence des médias
polonais à s'emparer de la JIDF s'explique sans doute autant
par un certain refus de l'héritage communiste que par le
poids d'une église catholique conservatrice et profondément
opposée à une remise en cause des rôles des
hommes et des femmes, tandis qu'en Roumanie, le rejet du communisme
et des cérémonies qui lui étaient liées,
comme la JIDF, se trouve compensé par l'instrumentalisation
commerciale de la JIDF, qui lui assure une médiatisation
remarquable, tout comme en Italie. En Espagne enfin, si la médiatisation
semble importante, c'est probablement aussi en raison d'une conjoncture
politique particulière, le Premier ministre Zapatero ayant
fait de la parité une de ses priorités, comme en
témoigne la composition de son gouvernement, où
hommes et femmes sont représentés à parts
égales.
Ajoutons, sur un plan plus général, que les origines
de la JIDF, dont la célébration reste perçue
comme liée aux régimes communistes, expliquent sans
doute aussi la modestie de sa célébration dans certains
pays (on pense notamment à l'Amérique du Nord, au
Royaume-Uni et aux Pays-Bas, ainsi, paradoxalement, qu'à
la Pologne). Le reflux des mouvements féministes un peu
partout dans le monde, parfois associé à la montée
des conservatismes, constitue un autre facteur d'explication globale
concernant les réticences face à la JIDF. En effet,
rares sont les médias, tous pays confondus, qui mobilisent
positivement la référence féministe s'agissant
du 8 mars, la plupart ne la mentionnant pas du tout.
La ligne éditoriale des médias
La ligne éditoriale des médias pris en compte
constitue un facteur déterminant dans l'importance accordée
à la JIDF. Mais là aussi, la réalité
dément bien souvent les attentes. Le premier clivage qui
se trouve vérifié dans la plupart des cas est celui
entre médias publics et privés. Dans notre corpus,
cela ne concerne que la télévision, les titres de
presse ici analysés étant dans tous les cas aux
mains d'entrepreneurs privés. Qu'il s'agisse de l'Espagne,
de la Pologne, de la France ou de l'Italie, les chaînes
de télévision publiques sont dans l'ensemble moins
réticentes à mettre la JIDF à leur programme
que leurs homologues privées. Les obligations de service
public ou d'intérêt général qui leur
sont faites, leur demandant entre autres d'assurer une représentation
équilibrée des diverses composantes de la population,
expliquent cette prise en compte. Ce sont aussi les chaînes
dont l'audience est modeste.
Les chaînes privées en revanche, assurent dans le
meilleur des cas un « service minimum », par le biais
des séquences d'information et dans le reste de leurs programmes
traitent de la JIDF sur un mode ludique, spectaculaire, voire
carnavalesque, réduisant la journée à une
occasion de valoriser la femme principalement comme consommatrice
et plus largement dans ses fonctions traditionnelles (mère,
séductrice), représentations aux antipodes de la
prise de conscience recherchée par la JIDF. La peur suscitée
par le risque de perte d'audience lié à des programmes
jugés trop « segmentants » s'ils se mettaient
à interroger de façon sérieuse le rôle
des femmes dans la société, explique ce positionnement.
La situation des titres de presse est plus surprenante. On pouvait
s'attendre à un clivage entre titres progressistes et conservateurs,
les premiers ouvrant largement leurs colonnes à un questionnement
sur les genres, bien en phase avec leur ligne éditoriale,
tandis que les seconds seraient plus réticents. Or dans
bien des cas, la réalité est tout autre. Au Canada,
en France, en Grande-Bretagne, par exemple, des journaux réputés
conservateurs ou populaires - type presse quotidienne régionale
(PQR) - ont fait une assez large place à la JIDF,
tandis que des titres réputés de gauche ou progressistes,
n'en ont quasiment pas parlé. Le constat de plus en plus
marqué dans le monde de l'entreprise du manque à
gagner du fait de l'accès limité des femmes à
des niveaux de responsabilité importants explique l'implication
de certains journaux conservateurs, proches des milieux et des
lectorats du monde des affaires. Par ailleurs, l'approche par
le biais de la quotidienneté, de la proximité et
du local, explique la place accordée par certains titres
plus populaires à cette journée. Rappelons en effet
que ces rituels - mais encore faut-il que la JIDF soit perçue
comme telle - peuvent être considérés
comme « réparateurs et régénérateurs
», sources de « continuité et de permanence
» dans un monde où la nouveauté et l'exceptionnel
érigés en norme suscitent un fort besoin d'ancrage
local et temporel.
A l'inverse, l'aspect rituel, le côté « marronnier
» d'une commémoration qui serait de ce fait vidée
de sens, suscite le silence de certains journaux progressistes
qui jugent que le 8 mars ne peut plus rien apporter à la
cause des femmes.
De quelques thèmes privilégiés
Travail, famille, politique
Pour les médias qui traitent de la JIDF sur un mode
informationnel (séquences d'information ou documentaires
à la télévision, articles d'information dans
la presse), quelques thèmes semblent faire l'unanimité
dans la plupart des pays étudiés : les problèmes
posés par la compatibilité entre la vie professionnelle
et la vie familiale - notamment avec la question de la garde
et de l'éducation des enfants -, la question de la
(sous) représentation politique et enfin les violences
dont les femmes sont victimes. La situation des femmes issues
de l'immigration, en provenance de pays de tradition musulmane
en particulier, constitue un autre thème fréquemment
abordé.
La référence internationale comme alibi à
la situation locale : les femmes et l'Islam
La dimension internationale de la Journée des femmes
est en revanche diversement prise en compte selon les pays. Si
en Roumanie et en Pologne, la JIDF est traitée comme un
événement strictement local, sans aucune extériorité
hors des frontières nationales, dans la plupart des autres
pays, l'« ailleurs » est bien présent. C'est
d'abord celui de la Turquie et de la répression violente
par les forces de l'ordre d'une manifestation à Istanbul
à l'occasion du 8 mars 2005, relatée par la quasi-totalité
des médias pris en compte. Cet unanimisme à propos
de cet événement - qui prend une signification
particulière dans les pays d'Europe, compte tenu de la
candidature de la Turquie à l'entrée dans l'Union
européenne -, est emblématique du rôle
de l'étranger qui, dans la plupart des cas, fonctionne
d'abord comme alibi à la situation locale. « Si tout
n'est pas parfait dans notre pays au regard de l'égalité
entre hommes et femmes, c'est pire ailleurs » : tel semble
être l'argument implicitement développé par
la plupart des médias, qui décernent ainsi une forme
de satisfecit et dédouanent de fait la société
dont ils sont l'émanation et qu'ils contribuent à
façonner.
Cet ailleurs, c'est aussi, dans presque tous les cas, d'abord
celui des pays musulmans et plus largement la question posée
par le statut des femmes dans l'Islam. On assiste ainsi à
une forme d'ethnicisation de la question féminine, liée
à la légitimation très forte de la figure
de victime, ces femmes étant parfois confrontées
à un risque de mort, qui par comparaison, fait apparaître
comme inconsistantes et presque superflues les revendications
des femmes dans les pays occidentaux (Decung, 2006).
Le prisme national
Si la référence internationale est diversement
mobilisée selon les pays et fonctionne le plus souvent
comme alibi à la situation locale et si l'on a pu faire
le constat de grands thèmes globalement partagés
par la plupart des médias, il n'en reste pas moins que
la JIDF est d'abord déclinée selon un prisme national
; ce faisant, elle donne accès de façon très
directe à un certain nombre de préoccupations, voire
de traditions locales. Ainsi du poids de l'Église et des
forces conservatrices en Pologne, qui s'opposent explicitement
à une manifestation - « La Manifa » - soutenue
par les mouvements féministes ; de la montée en
puissance des mouvements masculins au Canada et parallèlement
d'une mise en cause directe du féminisme ; de la focalisation
sur l'Irak et l'Afghanistan aux États-Unis, et de l'instrumentalisation
de la JIDF par un gouvernement soucieux de justifier son intervention
dans ces régions du monde ; du rôle des minorités
ethniques qui sert de prisme au 8 mars dans des pays comme le
Royaume-Uni, voire les Pays-Bas ; de celui des femmes musulmanes
et notamment maghrébines en France ; de la déclinaison
politique du thème en Italie, en Espagne et aussi en France
C'est donc bien à une dialectique entre le national et
l'international, à une déclinaison nationale d'une
thématique internationale que l'on assiste à l'occasion
de la JIDF.
Des tendances conservatrices
Destinée à l'origine à promouvoir les
droits de la femme, la JIDF doit permettre, dans les pays où
elle est « célébrée », de faire
un bilan des avancées et des freins à une parité
des sexes dans la société. Ceci n'empêche
pas que s'expriment à cette occasion des voix dissidentes.
Les médias contestant ouvertement la nécessité
d'uvrer pour une amélioration du statut des femmes dans
la société sont rares. Ils préfèrent
le plus souvent, sous couvert de pluralisme ou de neutralité,
laisser la parole à des « témoins »
qui, par le biais de micros-trottoirs, de courriers des lecteurs
ou de tribunes libres, contestent la pertinence de cette journée.
Nombreux sont en effet les exemples de contestation implicite.
Ainsi, comme on l'a vu, du silence de certains médias:
certains médias craignent une perte d'audience suite à
la diffusion d'articles ou de programmes consacrés à
la JIDF, tandis que d'autres sont opposés à ce type
de manifestation qu'ils jugent contraire à leur vision
du rôle traditionnel des femmes dans la société.
Mais la contestation des objectifs de cette journée se
fait aussi par la promotion des valeurs traditionnellement attachées
aux femmes : ainsi des médias qui mettent en scène
l'« éternel féminin », valorisant la
femme séductrice, voire la femme objet, la femme bonne
épouse et bonne mère, etc. La valorisation des femmes
d'exception, conforme à la logique spectaculaire que tendent
à promouvoir de nombreux médias, n'est pas non plus
neutre sur ce plan, qui tend à faire de la réussite
des femmes une affaire strictement individuelle et dédouane
du même coup la société de sa responsabilité
collective en matière d'égalité.
Enfin, l'un des biais peut-être les plus répandus
pour détourner la JIDF de sa finalité progressiste
initiale est sans doute le mode ludique. Ainsi, nombreuses sont
les émissions de télévision notamment, mais
aussi les articles et dessins de presse qui, sous couvert de badinage,
d'humour et de dérision, aboutissent, par un processus
de retournement carnavalesque à des caricatures du type
Madame porte la culotte, affirmant que ce sont les hommes qu'il
convient désormais de défendre si l'on ne veut pas
tomber sous la dictature des femmes. Cette crainte, feinte ou
réelle, de la prise du pouvoir par les femmes, aussi ancienne
que le monde (on se rappelle certaines pièces d'Aristophane
comme Lysistrata, Les grenouilles, Ploutos ou
l'Assemblée des femmes), est aussi formulée
de façon « sérieuse » dans un certain
nombre de médias, notamment au Québec où
les mouvements de défense des hommes connaissent un développement
important.
Terminons sur un des paradoxes révélé par
l'étude de la médiatisation de la Journée
internationale des femmes et qui permet son dévoiement
conservateur. Les pays où la visibilité médiatique
du 8 mars est la plus forte, l'Italie et la Roumanie, sont ceux
où cette journée fait l'objet d'une intense exploitation
commerciale : « l'otto marzo » italien est l'occasion
d'une débauche de mimosa offert par les Messieurs à
leur Dame de cur, tandis qu'en Roumanie, il prolonge le 1er mars,
où les dames se voient elles aussi offrir des cadeaux,
et devient prétexte à une vaste foire commerciale,
un peu à l'image de ce qu'est la Fête des mères
ou la Saint Valentin en France. Ultime retournement où
la société de consommation manifeste sa force et
sa vitalité, absorbant et récupérant une
manifestation initialement suscitée par la nécessité
de combattre l'injustice sociale. On se trouve ainsi en présence
d'une forme de « double-bind » où la notoriété
du 8 mars est assurée par le biais de son instrumentalisation
commerciale qui du même coup vide la JIDF de tout son sens,
voire en inverse purement et simplement la signification. Quoi
d'étonnant alors à ce que certaines forces progressistes
demandent sa suppression, rejoignant ainsi des mouvements conservateurs
opposés à cette manifestation ?
Au terme de cette mise en perspective des
dix contributions qui constituent l'objet de cette étude,
quels enseignements peut-on tirer de l'étude de la médiatisation
de la JIDF au regard de la question plus vaste du rapport entre
femmes et médias ?
Depuis plusieurs années, la communauté internationale
s'émeut de la façon dont les médias représentent
les femmes, consciente qu'elle est désormais qu'uvrer sur
le terrain pour une plus grande parité entre les sexes
ne va pas sans agir conjointement sur le front des médias.
La 4ème Conférence mondiale des femmes qui s'est
tenue à Pékin - Beijing - en 1995 a consacré
une partie de ses travaux à cette question, réactualisés
lors de l'examen « Beijing+5 » de 2000 et repris lors
des derniers sommets mondiaux sur la Société de
l'Information (Genève 2003 et Tunis 2005). Ils ont conclu
à la nécessité de favoriser la participation
des femmes à la prise de décision dans les médias
et de promouvoir une représentation médiatique équilibrée
et non stéréotypée des femmes (Gallagher,
von Euler, 1997, et les travaux du groupe Mediawatch, déjà
cités).
Les recherches sur la représentation des femmes font en
effet état de stéréotypes persistants consistant
à la figurer sur le plan physique comme grande, mince,
à la peau claire et à la poitrine généreuse
(modèle de la poupée Barbie) ; comme étant
par ailleurs hétérosexuelle, bonne épouse
et bonne mère, femme d'intérieur accomplie en même
temps que femme active à la carrière enviable. Est
ainsi occulté et dévalorisé tout ce qui ne
relève pas de ce paradigme : les femmes qui ne correspondent
pas à ces critères physiques, qui sont âgées,
handicapées, non blanches, lesbiennes, etc.
En même temps qu'ils révèlent l'hégémonie
de la culture et des modes de vie occidentaux, ces stéréotypes
ont un pouvoir de prescription important, et constituent une contrainte
sociale forte. Ils fonctionnent en effet comme autant de messages
subliminaux assurant la pérennité des jeux de rôle
sociaux où hommes et femmes sont affectés à
des fonctions spécifiques. En outre, cette homogénéisation
dans la représentation d'une femme idéale et idéalisée
sert les intérêts du marché, qui s'appuie
sur l'imposition de ces modèles pour vendre certains types
de vêtements, des produits de beauté et des régimes
amincissants de tous ordres.
La principale alternative actuellement proposée à
cette domination du marché néo-libéral qui
exploite le corps des femmes, jouant sur la force des apparences
et la tyrannie du look, est constituée par des forces conservatrices
qui répondent à cette exhibition du corps des femmes
par son occultation, sa négation, sa répression.
En témoignent les valeurs promues par les fondamentalismes
de tous ordres, y compris dans nos pays occidentaux.
Or la médiatisation du 8 mars offre dans la plupart des
pays étudiés une solution de rechange, ponctuelle,
mais néanmoins intéressante. Certes, on a pu observer
des forces conservatrices à l'oeuvre dans le silence de
certains médias, dans des représentations traditionnelles
des femmes - encore trop largement répandues -, dans les
ambiguïtés des mises en scène humoristiques,
dans l'exploitation commerciale de cette journée, largement
relayée par les médias. Il n'en reste pas moins
que la médiatisation de la JIDF permet dans la plupart
des cas un retour réflexif sur les jeux de rôles
traditionnels entre hommes et femmes, une réflexion critique
sur les avancées et surtout les blocages à une meilleure
prise en compte de la parité entre les sexes. Elle est
probablement le seul jour où la rhétorique de l'égalité
aujourd'hui dominante dans nos sociétés occidentales,
est directement confrontée aux discriminations de fait,
et où la couverture médiatique elle-même exhibe,
pour tenter de le résorber, « le hiatus entre la
légitimité officielle de l'égalité
et la réalité du sexisme » (Macé, 2006,
101). L'étape suivante consistera, pour les médias,
à effectuer un retour critique sur leurs propres pratiques
en matière de parité hommes/femmes, à remettre
en cause leur façon de fonctionner, notamment dans la répartition
des responsabilités entre hommes et femmes, répondant
ainsi aux injonctions qui leur avaient été faites
- mais qui n'avaient pas été suivies d'effet - suite
à la Conférence de Beijing + 5.
Enfin, l'existence d'une Journée internationale des femmes
étant le signe et la reconnaissance d'une dis-parité
entre les sexes, on ne peut que souhaiter sa disparition, comme
la fin des symptômes signifie le retour à la santé.
En attendant, le 8 mars reste l'occasion d'alerter la société
sur un de ses dysfonctionnements majeurs et il va de la responsabilité
des médias de se saisir de cette occasion de jouer leur
rôle dans l'espace public contemporain.
©
Sciences de la Société n° 70 - février
2007
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Claire
BLANDIN,
Géographies médiatiques...
et droits des femmes
Résumé
L'héritage communiste,
la concentration économique et le retour des valeurs morales
apparaissent comme trois grilles de lecture permettant de distinguer
trois ensembles régionaux parmi les dix pays participant
à l'étude. Ces trois axes sont donc retenus ici
pour présenter la situation des femmes et les paysages
médiatiques dans ces espaces, expliquant la sélection
des supports effectuée.
Mots
clés : droits
des femmes, paysage médiatique, groupes de communication.
Sheila PERRY, Pamela M. MOORES, International
Women's Day : réticences au Royaume-Uni
Résumé
La Journée internationale
des Femmes n'est guère célébrée au
ru, et a attiré peu d'attention médiatique en 2005.
Malgré les initiatives de femmes de premier plan, une campagne
syndicaliste et des célébrations sur le terrain,
les médias nationaux, surtout la télévision,
n'en ont guère traité. La presse et la radio locales
en ont fait une couverture modeste et apolitique. L'accent était
mis sur les femmes et l'emploi. Les médias nationaux ont
fait allusion aux violences et à l'oppression dont les
femmes étaient victimes à l'étranger, mais
n'ont guère mentionné ce thème dans le contexte
britannique. La jidf était parfois vue d'un il amusé.
Dans une ère post-féministe et post-moderne, le
débat sur l'égalité des chances est axé
sur le multiculturalisme plutôt que sur le genre. La jidf
était soit une affaire locale, soit une affaire étrangère.
Mots
clés : Journée
internationale des femmes, Royaume-Uni, presse, télévision,
médias, commémoration, national, proximité.
Danièle
TORCK,
Entre indifférence et tradition.
Réflexions sur quelques instantanés du 8 mars 2005
dans les médias des Pays-Bas
Résumé
La couverture médiatique
nationale du 8 mars 2005 aux Pays-Bas témoigne d'un agenda
politique et médiatique discret ou réticent. En
dehors de quelques manifestations de caractère ludique
et anecdotique, les documents analysés sont représentatifs
de l'attention portée par la société néerlandaise
à l'étranger, et des débats publics dominants :
société multiculturelle, rôle de la religion,
position des femmes allochtones, et perception traditionnelle
de la combinaison de tâches professionnelles et maternelles.
L'absence de la figure paritaire en politique et au plan socio-économique
dans cette période illustre le paradoxe d'une représentation
politique des Néerlandaises de bon niveau, coexistante
à une présence très limitée dans les
instances de décision et une précarité économique
potentielle liée au temps partiel.
Mots
clés : Pays-Bas,
8 mars 2005, couverture médiatique, banalisation, traditions,
paradoxes.
Dominique DESMARCHELIER, Le
8 mars dans la presse suisse romande. Entre dérision et
dénonciation des inégalités
Résumé
Le traitement de la Journée
Internationale Des Femmes dans la presse suisse romande peut passer
de la dérision, humoristique voire parfois machiste, à
la dénonciation des inégalités à travers
le compte-rendu des manifestations organisées par les diverses
associations. La mise en valeur de femmes d'exception (dans les
domaines politiques ou culturels) constitue le troisième
thème abordé.
Mots
clés : Suisse romande,
JIDF, manifestations, crimes, femmes d'exception, inégalités.
Simone BONNAFOUS, Marlène COULOMB-GULLY, La
Journée internationale des femmes en France. Entre marronnier
et foulard islamique
Résumé
En France, la Journée
internationale des femmes est désormais bien installée
dans le calendrier social et l'écho que lui donnent les
médias est réel, quoique variable. Leur ligne éditoriale
constitue un premier biais (ainsi les télévisions
de service public accueillent-elles plus volontiers l'événement
que les chaînes commerciales), mais la dimension rituelle
de l'événement rebute des médias traditionnellement
favorables à la cause des femmes. La façon dont
le 8 mars est traité, en dépit de tendances conservatrices
renvoyant les femmes à leurs fonctions traditionnelles,
est en général progressiste et « politiquement
correcte », la focalisation sur le rapport des femmes à
l'islam constituant une tendance lourde de la version 2005.
Mots
clés : 8 mars,
Journée internationale des femmes, femmes, féminisme,
mouvements de femmes, « Ni putes ni soumises »,
médias, télévision, presse.
Nadine CELOTTI, Pascale JANOT, L'Otto
marzo italien et le mimosa. Une fête ritualisée au
service du politique et de la consommation
Résumé
L'analyse de l'appareil discursif
médiatique (télévision et presse) mis en
uvre pour relater le 8 mars 2005 en Italie fait émerger
qu'il participe désormais d'un rituel politico-institutionnel
où les voix qui proclament la parole de la fête sont
avant tout celles des femmes (peu) et des hommes de l'establishment,
celles de la femme de la rue et des mouvements étant totalement
passées sous silence. Ce discours ambiant se focalise d'abord
sur la femme italienne/occidentale engagée dans son ascension
vers le pouvoir qui reste l'apanage de l'homme (silence médiatique
sur les violences) puis sur la femme d'ailleurs, d'un ailleurs
musulman surtout, où la femme doit encore lutter pour ses
droits fondamentaux. Sur fond de mimosa, image symbole de l'Otto
marzo, la fête se colore également d'aspects consuméristes,
véhiculés par une publicité créée
ad hoc, qui bien qu'alimentant sa popularité, offusquent
ses origines et remettent en question ses vraies valeurs.
Mots clés :
Journée internationale
de la femme, médias, rituel, consumérisme, mimosa,
Otto marzo.
Lydia
FERNANDEZ, Montserrat RIBAS,
Espagne : le nouveau pouvoir des femmes
Résumé
La célébration
du 8 mars 2005, en Espagne, éclipsée en partie par
le rappel des attentats de Madrid l'année précédente
(le 11 mars 2004) a été marquée par une série
de mesures concernant la parité entre les hommes et les
femmes. Adoptées par le nouveau gouvernement socialiste
arrivé au pouvoir le 14 mars 2004, elles ont été
largement reprises par les médias qui, eu égard
à cette position officielle, ont consacré à
la femme un espace majeur dans presque tous les quotidiens et
chaînes de télévision. L'analyse de la mise
en discours de la presse et de la télévision apporte
des éléments qui nous permettent de mieux connaître,
à travers les thèmes associés à la
femme, les enjeux politiques et socioculturels qui les sous-tendent.
Mots
clés : femme,
discours, médias, Espagne, Catalogne, presse, télévision,
temps, espace, parité.
Camelia
BECIU, Valentina MARINESCU,
Le 8 mars roumain : un concept publicitaire
Résumé
Pendant les cinquante années
de communisme le 8 mars et la thématique « femme »
ont été annexées à la machinerie de
propagande. Le post-communisme a modifié profondément
l'espace symbolique roumain, en désacralisant très
vite les grandes cérémonies et autres mobilisations
collectives qui avaient été instituées par
l'ancien régime. A cet égard le 8 mars ne fait pas
exception. Perçue comme occasion de rhétorique politique,
la jidf avait peu de chances de figurer à l'agenda des
médias, des hommes politiques ou des ong après 1989.
L'étude analyse les modes discursifs par lesquelles les
médias ont dépolitisé cette journée
tout en la consacrant comme un rituel cérémoniel
faisant partie de la culture populaire urbaine a visée
consumériste. Par le biais de la ritualité sociale
et de la parole de divertissement les médias ont institué
le 8 mars comme un vrai concept publicitaire. Et de ce point de
vue, le 8 mars ne fait pas débat et n'institue aucune «
problématique ».
Mots clés : rituel social, problème
public, discours médiatique, parole de divertissement.
Lucyna
KOPCIEWICZ,
Oeillet rouge et tulipe rouge. La
forte polarisation idéologique du 8 mars en Pologne
Résumé
Cet article discute des représentations
existantes autour la JIDF en Pologne. Le 8 mars est perçu
comme «la journée purement communiste» appartenant
à son folklore spécifique. Actuellement, la jidf
semble être profondément reformulée du point
de vue catholique, conservateur, féministe etc. Les jeux
des discours culturel, social et politique dont l'enjeu est le
statut de la jidf sont présentés dans cette étude.
En outre, l'absence permanente de dimension internationale de
la « jdf polonaise » est discutée.
Mots clés : identité postcommuniste,
vestige communiste, honte, destin des femmes, féminisme.
Josette
BRUN, Barbara M. FREEMAN,
L'après-8 mars au Canada anglais
et au Québec. Une célébration contrastée
Résumé
La couverture médiatique
de la JIF 2005 au Canada anglais et au Québec, produite
majoritairement par des femmes, est surtout d'intérêt
local, la dimension internationale servant le plus souvent de
faire-valoir à la réalité canadienne et québécoise.
Le féminisme est peu cité mais souvent en filigrane,
à la fois l'objet de dures critiques et de joyeux éloges.
Les médias canadiens anglais ont été plus
sensibles à l'information promotionnelle de l'organisme
féministe fédéral au sujet de la jif et ceux
du Québec, à une actualité marquée
par la « question masculine ». Les différences
observées entre les journaux et les textes d'un même
quotidien témoignent par ailleurs de la marge de manoeuvre
dont disposent les journalistes au pays, même dans les médias
conservateurs.
Mots clés : JIF, féminisme, droits
des femmes, Québec, journalisme.
Carolyn
BYERLY, Danna L. WALKER,
L'invisible commémoration
de la Journée internationale des femmes dans les médias
américains
Résumé
Les principaux médias
américains ont fait preuve d'une remarquable myopie dans
leur couverture de la Journée Internationale des Femmes
en 2005. Un examen des quelques émissions et articles diffusés
et publiés révèle une insistance sur les
femmes qui sont en vue dans l'administration du Président
Bush. Les reportages ignorent par conséquent un grand choix
de sources d'information (par exemple, les leaders féministes
et les femmes ordinaires), les sérieux obstacles à
la participation des femmes à la vie sociale (par exemple,
la pauvreté, l'inégalité dans les rémunérations)
en dépit de leurs acquis importants et qui ne sont
pas non plus médiatisés notamment dans les
domaines des affaires, de la politique et du sport.
Mots clés : femmes et média, analyse
féministe des media, sexisme dans les media.