Professeur de Sociologie, chercheur au CERTOP-CNRS, UniversitéToulouse-Le
Mirail
(Maison de la recherche, 5, all. Antonio-Machado, 31058, Toulousecedex).
Cochoy@univ-tlse2.fr
Maître de conférences en Sociologie, chercheur auLaboratoire
APS et sciences sociales, Université M. Bloch(14, r. R.-Descartes
67084 Strasbourg cedex).
fabien.ohl@umb.u-strasbg.fr
Enseignant-chercheur, Institut National des Télécommunications,Groupe
des Écoles de Télécommunication (9,r. Charles-Fourier,
91011 Evry cedex).
gael.bonnin@int-evry.fr
Sociologue, Laboratoire « Usages, Créativité,Ergonomie
», France Telecom Recherche & Développement(38-40
bd Général Leclerc, 92130 Issy les Moulineaux).
alexandre.mallard@cnet.francetelecom.fr
Chargée de recherche en sociologie, Unité Eco-Développement,INRA-SAD
(Site Agroparc, Domaine saint Paul, 84914 Avignon cedex9).
Chercheur à l'IRES (16, bd du Mont-d'Est, 93192 Noisy-le-Grandcedex)
Maître de conférences en Sociologie, Centre d'étudeet
de recherche en sociologie des organisations (CERSO), UniversitéParis
IX-Dauphine (pl. Mal de Lattre de Tassigny 75116 Paris)
Doctorante en Anthropologie, chercheur associée au Centrede
recherche sur les liens sociaux (CERLIS), UniversitéParis
V-CNRS (45, r. des Saints Pères 75270 Paris cedex06) et
membre du groupe de travail Matière à Penser.
melanieroustan@yahoo.com
Allocataire d'enseignement et de recherche en sociologie, chercheurau
CERTOP-CNRS, Université Toulouse-Le Mirail (Maison dela
Recherche, 5, all. Antonio-Machado 31058 Toulouse cedex)
Doctorante en sociologie, chercheur au certop-cnrs, UniversitéToulouse-Le
Mirail (Maison de la Recherche, 5, all. Antonio-Machado31058 Toulouse
cedex).
barrey@univ-tlse2.fr
Chercheur associé au Centre de recherche en gestion del'École
Polytechnique (1, rue Descartes, 75005 Paris),et consultante à
Développement social et organisation
(97, bd du Montparnasse, 75006 Paris)
Cet intérêtcroissant pour le client a pour toile de fond les débatssur la mondialisation et la marchandisation, la transformationdu capitalisme, l'ouverture à la concurrence des servicespublics, les progrès des nouvelles technologies, etc.
L'idée de " coproduction"
bénéficie en sciences sociales d'une fortesympathie,
dans la mesure où cette notion, forgéeà partir
de l'analyse des interactions au guichet des servicespublics,
a surtout visé à mettre l'accent sur ladignité
et les compétences de l'usager. Pourtant,étendre
l'observation des mécanismes de coproductionau secteur
privé devrait inciter les sociologues àdavantage
de prudence : au " MacDo " (Ritzer, 1999)ou dans tout
autre commerce en " libre-service ", lasollicitation
d'une participation active du consommateur àla production
du service, loin d'enrichir l'interaction, ne tend-ellepas à
en interdire l'occurrence ? Partant, les dangersde cette coproduction
mal maîtrisée en vigueur dansle secteur marchand
ne risquent-ils pas de se retrouver, si l'onn'y prend garde, dans
le secteur des services publics ? (pourune illustration de ce
dernier point, cf. Cochoy, De Terssac,1999).
La mobilité du consommateurest
au cur du marché : on retrouve cette notion dans lacondition
de " fluidité " nécessaire audéploiement
d'une concurrence pure et parfaite qui exigeque les acteurs économiques
puissent entrer et sortir librementdu marché ; on retrouve
aussi la mobilité dans laversion politisée de cette
même " fluidité" chez Hirschman (1970),
pour qui l'exit (sortie)est une forme d'expression possible
d'un mécontentementvis-à-vis des conditions de l'échange
(alternativeà la voice, c'est-à-dire à
la prisede parole). Il existe donc deux versions de la sortie
: àla sortie générale du marché (quitter
lasphère de l'échange pour se retrancher dans l'espacedomestique)
s'oppose la sortie plus limitée qui consisteà se
détourner d'un fournisseur pour passer àun autre,
tout en restant dans le marché (jouer sur laconcurrence).
Dans tous les cas, la " zone d'incertitude" recouvre
ici son sens littéral, c'est-à-direspatial : le
marché est bien un lieu où l'on entreet d'où
l'on sort, c'est aussi un lieu où l'on circuleune fois
entré ; bref, le pouvoir s'y mesure en termesde degrés
de mobilité, au sens concret du terme.
Saluons ici la contribution décisivedu
groupe de recherche " langage et travail ", dontles
intuitions jadis marginales sont devenues centrales (Borzeix,Fraenkel,
2001), peut-être grâce à la reconnaissancecroissante
du rôle des interactions langagières entreagents
et usagers dans le déroulement des activitésde travail
et d'organisation.
L'encastrement des relations marchandesdans
les réseaux sociaux n'épuise pas la réalitédes
relations de marché (Granovetter, 2000) ; bien au contraire,la
persistance de relations anonymes entre l'offre et la demandeconstitue
la matière et le problème centraux dutravail marchand
; ce travail consiste autant à animerles réseaux
qu'à les couper (pour " capter" la clientèle
des concurrents) et à les nouer(pour garder la sienne)
(Cochoy, 2001c).
Possessif mais non exclusif : lafidélité
à sa banque n'interdit nullementla multibancarisation qui
tend au contraire à se développer[Cusin].
Les exigences d'humanisation et detechnicisation
sont contradictoires, et sont donc à lasource de vives
tensions entre différentes façonsde définir
la professionnalité du vendeur, qu'illustreparticulièrement
bien le cas de la banque, un secteur moins" technologisé
" que la vente des télécommunications,mais
en passe de le devenir [Cusin, Ughetto].
L'exemple des télécommunicationsest
particulièrement fécond, dans la mesure oùil
nous montre qu'au-delà des compétences gestuelleset
verbales révélées par l'étude desrelations
de guichet (Joseph, Jeannot, 1995), le travail relationnelmobilise
aussi tout un outillage matériel composéde base
de données, d'outils de communication, de logicielsd'extraction
d'informations, qui font de cette activitéune pratique
beaucoup plus proche du travail industriel qu'onaurait pu le penser
(à partir de là, on peut biensûr rappeler
que même la relation de guichet est outillée: quand
l'hygiaphone n'est plus là pour cadrer les interactions[Latour,
1994], il y a toujours à proximité un "terminal
", un " téléphone " ou une"
documentation " servant à établir nonseulement
le lien entre le local et le global, mais aussi àborder,
définir, canaliser la nature de l'échange[Neuville,
1995]).
Cette notion de performation estempruntée
à la théorie des actes de langaged'Austin. Un énoncé
performatif est un énoncédit et fait ce qu'il dit
simultanément ; pour l'applicationde cette notion à
la sociologie de l'économie etdes sciences de gestion,
cf. Callon, 1998.
En témoigne le rendement explicatifdécroissant
des approches statistiques fondées surle calcul de moyennes
à mesure que l'écart typeaugmente : " si
les tris croisés nous indiquentles propriétés,
attitudes, pratiques, opinions,etc., statistiquement les plus
attachées à tel groupesocial ou à telle catégorie
sociale, ils ne nousdisent pas que chaque individu composant le
groupe ou la catégorie,ni même la majorité
d'entre eux, rassemble la totalitéou la majorité
de ces propriétés. Si on escomptaitle contraire
(ce que font beaucoup d'apprentis sociologues,mais, disons-le
aussi, beaucoup de sociologues de métier),alors la rencontre
avec les enquêtés (les individusdans leur irréductible
singularité) serait totalementdéroutante. Combien
d'étudiants se plaignent dene pas avoir sélectionné
dans leur population étudiéede "vrais ouvriers",
de "vrais cadres", de"vrais artisans", croyant
que le problème estde méthodologie là où
il est question d'erreurde conception du monde social et des acteurs
sociaux ? "(Lahire, 1996).
Nous avons déjà abordécette
question à plusieurs reprises (cf. Cochoy,1999b
; Cochoy, 2000 ; Cochoy, De Terssac, 1999 ; Cochoy, Neuville,2000)
; le présent numéro offre l'occasion d'avancerencore
dans son examen.
" conquérir et fidéliserla
partie non captive de [son] marché suppose que la Régietraite
l'ensemble des usagers comme des clients " [Lévy].
Pour une analyse plus généralede
ces transformations et de leurs enjeux comme par exemplela
distinction de plus en plus prégnante et fondamentaleentre
back office et front office , cf.l'excellente
analyse du nouveau monde industriel récemmentmenée
par Pierre Veltz (2000).
On retrouve ici, sous une forme radicalisée,un
processus bien connu en théorie des organisations (Friedberg,1993).
Cette expression choc est destinéeà
faire passer en deux mots un message que chacun entendra,aux Etats-Unis,
comme " fabriqué dans un atelier Nikeoù suent
des enfants ".
Ou plutôt le retour, dans lamesure
où l'usage de la consommation comme moyen de promouvoirdes
intérêts politiques est à l'origine mêmedu
consumérisme (Chessel, 2002).
Un mouvement incarné par exempleen
France par le collectif de l'éthique sur l'étiquette(Cochoy,
2001b).