SCIENCESDE LA SOCIÉTÉ- N° 57 - octobre
2002
Autour
du développement durable
Dossiercoordonné
par AlainALCOUFFE, Sylvie
FERRARI et Laurent GRIMAL
Alain ALCOUFFE, Sylvie FERRARI, LaurentGRIMAL, Les enjeux du développementdurable(Texte intégral)
Jean-Alain HERAUD, René KAHN, L'action
économique des collectivitésentre développement
endogène et exogène
Philippe ROBERT-DEMONTROND, Clauses,
normes et chartes sociales. Principes et enjeuxde nouvelles règles
du jeu concurrentiel
Géraldine FROGER, Pascal
OBERTI, Gouvernanceet développement durable. L'aide multicritère
àla décision participative
Muriel MAILLEFERT,État, actionpublique et territoire.
Quels enjeux pour la politique d'emploiterritoriale ?
André TORRE, Armelle CARON, Conflits
d'usages et de voisinage dans les espaces ruraux
Corinne MEUNIER, Dominique VOLLET, Stratégiesd'acteurs
et efficacité des politiques publiques territoriales.Le
cas des CTE dans la région Auvergne (France)
Laurent GRIMAL, Chariloas KEPHALIACOS, PatriceROBIN, Questions théoriques autourde l'efficacité
environnementale des contrats territoriauxd'exploitation
Lourdes VILADOMIU, Jordi ROSELL, Gemma FRANCÈS, La
diversification des exploitations agricoles et leurcontribution
au développement rural. Le cas de la Catalogne
Michel BLANC, Eric CAHUZAC, Gabriel
TAHAR, Externalités d'agglomération
et fluxde main d'oeuvre
ARGUMENTS
Sylvie GRAZIANI,Une approche théorique desdynamiques d'évolution
territoriale
NOTE
Bernard JUNOD, Maurice BASLÉ, Apportsdes
usagers de l'eau d'alimentation dans le processus d'évaluationdes
politiques publiques
NOTES DE
LECTURE
Alain ALCOUFFE,Sylvie
FERRARI, Laurent GRIMAL,Les enjeux du développementdurable
Texteintégral
S'il est vrai queles
réflexions sur la relation entre les activitéséconomiques
et l'environnement étaient déjàprésentes
dans la philosophie antique, elles prennent uneplace grandissante
dans la seconde moitié du XXèsiècle avec
l'apparition des pollutions, des déchetsissus de modes
de consommation gaspilleurs de ressources, la surexploitationdes
systèmes naturels, la consommation croissante d'énergiesd'origine
fossile dans un contexte de croissance exponentiellede la population
mondiale. Le développement durable estun concept qui apparaît
dans les années 1960, aumoment même où l'idée
d'une croissance illimitéecommence à être
remise en cause (Meadows, 1972).La croissance zéro est
alors considérée commeune solution qui permet d'assurer
le développement économiquetout en garantissant
la protection de l'environnement.
Développement durable,environnement
et société
La genèse du conceptpeut
être appréciée à travers troisdates
clés. En 1972, lors de la Conférence mondialede
Stockholm sur l'environnement humain, organisée parles
Nations-Unies, la notion « d'éco-développement»
est adoptée par la communauté internationale.Ce
premier pas traduit la volonté d'ouvrir la voie versun
développement compatible avec les équilibresnaturels
et la protection de l'environnement. Dès lors,l'idée
d'un développement guidé àla fois par des
considérations économiques, socialesmais aussi écologiques
va peu à peu infiltrer lesgrands programmes internationaux
: création du Programmedes Nations-Unies pour l'Environnement
en complément duProgramme des Nations-Unies pour le Développement,
parexemple.
Quelques années plustard,
c'est l'apparition d'un nouveau type de pollution qui orienteles
réflexions vers la nécessité d'agir demanière
solidaire au niveau de la biosphère. Eneffet, les pollutions
globales telles que les pluies acides, l'effetde serre qu'accompagne
notamment l'accroissement continu du CO2dans l'atmosphère,
l'accumulation des déchets nucléaires(...) sont
autant de facteurs qui révèlent àl'homo oeconomicus
les limites de son action. En 1988, avec lapublication du Rapport
Brundtland, Our common future (CMED,1988), le concept de
développement durable est proposéà partir
d'une approche environnementale découlantd'un double constat
: la fragilité de la biosphèreet de ces mécanismes
régulateurs et celle du développementlui-même.
Le développement durable est alors définicomme « un développement
qui répond auxbesoins du présent sans compromettre
la capacitédes générations futures à
répondreaux leurs ». Cette définitionest
progressivement adoptée par la communauté scientifique.C'est
également la définition la plus largementmédiatisée.
Ce type de développement reposesur donc plusieurs principes
: un principe de solidaritéavec les générations
futures et avec les populationsprésentes sur la planète,
un principe de précautionet un principe de participation
de tous les acteurs de la sociétécivile au processus
de décision. Il exige aussi de passerd'une approche réparatrice
des dégâts environnementaux,jusqu'alors dominante,
à une approche préventive.
La popularité de la définitionproposée
dans le Rapport Brundtland peut s'expliquer parson imprécision
et son caractère général.Elle permet en effet
de masquer nombre de conflits
potentiels. D'une part,face à la multiplication tant
des pollutions globales (effetde serre anthropogénique,
déplétion de lacouche d'ozone, etc.) que des micropollutions,
l'objectif d'équitéinter-générationnelle
exige pour le moins de maintenirl'intégrité de la
biosphère et de ses mécanismesrégulateurs.
Il s'agit donc d'introduire une responsabilitééthique
vis à vis de nos descendants en faisantimplicitement référence
à des stratégiesde préservation du patrimoine
naturel et des écosystèmes.D'autre part, la définition
fait référenceà un objectif d'équité
intragénérationnellequi implique à la fois
une responsabilité éthiquedes pays développés
vis à vis des pays moinsdéveloppés, mais
également au sein des premiers,des liens de solidarité
accrus entre ceux qui sont socialementintégrés et
ceux qui sont exclus des systèmeséconomiques et
sociaux. En somme, comme elle vise ànommer deux défis
plutôt qu'à ordonner lesactions à entreprendre,
elle génère autourd'elle un consensus. Néanmoins,
ce consensus vole en éclatdès qu'il s'agit de dématérialiser
et «décarboniser » les procédés
de consommationet de production, ou encore de modifier la répartitiondes
richesses entre les différents pays et au sein de chaquepays.
La troisième date cléest
1992, année où se déroule à Riode
Janeiro la Deuxième Conférence mondiale des Nations-Uniessur
l'environnement. A ce « Sommet de la Terre »,les réflexions
portent la marque de changements majeursau niveau mondial : depuis
la Conférence de Stockholm,la population mondiale est passée
de 3,5 milliards d'individusà 5 milliards, l'appauvrissement
des pays du Sud s'estaccentué, le remboursement de la dette
absorbe l'aide publiquedu Nord, etc. La Conférence de Rio
aboutit sur plusieurspoints : rédaction des principes de
la Déclarationde Rio, d'un programme d'actions pour le
XXIè siècleavec l'Agenda 21 et de deux conventions
: convention-cadre surle changement climatique et convention sur
la diversitébiologique.
Parmi les principes qui sous-tendentle
développement durable, on mentionne le plus souventla précaution
en matière d'environnement, l'intégrationde la protection
de l'environnement comme partie intégrantedu processus
de développement, la responsabilitéet la solidarité
internationales, le système «pollueur-payeur »
et la participation pour une nouvelleforme de gouvernance. La
mise en uvre de ces différentsprincipes doit permettre
d'atteindre les objectifs de lutter contrela pauvreté,
de préservation des équilibresde la biosphère
et des ressources environnementales dansune perspective de long
terme, et de favoriser les modes de productionet de consommation
durables i. e. dotés d'une efficacitéénergétique
élevée, tout cela dansle respect des générations
présentes et futures.
Cependant, malgré cetteprise
de conscience des problèmes environnementaux et desous-développement,
malgré l'accord sur une meilleuredéfense du patrimoine
naturel alliée à uneamélioration de la qualité
de la vie pour l'ensemblede l'humanité, les actes qui traduiraient
de manièreconséquente ces principes sont encore
trop peu nombreux.Et lorsqu'ils existent, ils relèvent
davantage d'actesisolés que d'une stratégie politique
à grandeéchelle. Dès lors, il n'est pas surprenant
que,dix années plus tard, divers indicateurs de développementdurable
montrent combien la pression exercée par l'activitéhumaine
sur l'environnement est sérieuse et croissanteet combien
les inégalités n'ont cessé deprogresser.
Examinons succinctement certains indicateurs.
Changement climatique
Le réchauffement climatique,très
probablement induit par l'augmentation des gaz àeffet de
serre et dont la responsabilité incombe pour l'essentielaux
émissions de gaz carbonique, pourrait avoir de fortesconséquences.
Si l'évolution actuelle se prolongeait,les variationsde températures
auraient des effets conséquentssur les écosystèmes,
la répartition des populationset les conditions sanitaires,
notamment en raison d'un fort accroissementdes irrégularités
temporelles et géographiquesdes précipitations.
On ne peut non plus exclure des chocsde grande ampleur notamment
sur la circulation océanique(IPCC, 2002).
Biodiversité
En l'absence d'une préservationsuffisante,
la diversité biologique est menacéed'appauvrissement
de manière chronique. Selon les Nations-Unies(2001a), qui
se réfèrent à la Liste rouge2000 des espèces
menacées publiée par l'Unioninternationale pour
la conservation de la nature et de ses ressources(uicn)-Alliance
mondiale pour la nature, la troisième phased'une crise
mondiale majeure de la disparition des espècess'amorce.
Cette liste propose un jeu de critères quantitatifspour
l'évaluation de la situation des espèces etde leur
habitat. En 2000, l'uicn met en avant le fait que de nombreusesespèces
pourraient disparaître au cours des premièresdécennies
du XXIè siècle si la communautémondiale n'accentue
pas considérablement son appui, saparticipation et son
engagement en faveur de la préservationdes espèces.
La liste rouge comprend notamment 11 046 espècesmenacées
de disparition et 816 espèces qui ont déjàdisparu
ou ont disparu à l'état sauvage. Les espècesmenacées,
bien que représentant moins de 1 % desespèces connues,
représentent cependant 24 % detoutes les espèces
de mammifères et 12 % de toutesles espèces d'oiseaux.
Pauvreté
Toujours selon les Nations-Unies(2001b),
entre 1990 et 1998, le taux de pauvreté dans lespays en
développement, établi sur la base d'un seuilmondial
de pauvreté fixé à 1 dollar par jour,a diminué
de 29 à 23 %. Si cette tendance décroissantepouvait
être maintenue à ce rythme, le taux de pauvretéserait
en 2015 quasiment inférieur de moitié àcelui
de 1990. Mais en raison de la croissance démographique,le
nombre total de personnes vivant dans la pauvreté aseulement
légèrement diminué au cours desannées
1990, passant de 1,3 à 1,2 milliard de personnes.De plus,
cette évolution globale cache de fortes disparitésrégionales.
Par exemple, en Afrique subsaharienne, le tauxde pauvreté
est demeuré largement inchangéentre 1990 et 1998,
se situant autour de 48 %, et le nombre depersonnes vivant dans
la pauvreté est passé de 217à 291 millions.
Par ailleurs, les inégalités dans la répartitiondes
revenus à l'échelle mondiale se sont accentuéesau
cours des dernières décennies, en raison essentiellementde
l'écart qui se creuse entre les pays les plus nantiset
les pays les plus défavorisés. Le rapport entrele
revenu moyen des 20 % les plus riches du monde et le revenumoyen
des 20 % les plus pauvres de la planète, qui étaitde
60 à 1 en 1991, atteint 78 à 1 en 1994. Les 20%
les plus pauvres ne reçoivent que 1,1 % du revenu mondial,ce
qui représente une diminution par rapport à 1991(1,4
% du revenu mondial).
Évolution des modes deproduction
et de consommation
L'un des principaux enjeux du développementdurable
réside dans la capacité d'une économieà
générer une croissance de long terme, pérenne.La
création de richesses est, en effet, une condition nécessairedu
développement et du progrès économiqueet
social. C'est du moins le postulat sous-jacent à unedéfinition
anthropocentrée du développementdurable. Mais cette
croissance doit prendre en compte le maintiendes stocks de capitaux
et la bonne gestion du patrimoine naturel.Il s'agit donc d'améliorer
la productivité globalede l'économie à travers
la dématérialisationdes activités et la limitation
des consommations d'énergie,de matières premières
et d'espace. Dans cette perspective,les indicateurs doivent apporter
des éléments deréponse sur l'éventuel
couplage ou découplagede la croissance économique
au regard des différentescatégories de capitaux
ou de ressources (Spangenberg, 2000).Il s'avère que ce
découplage entre croissance économiqueet pressions
exercées sur l'environnement n'est dans lemeilleur des
cas que partiel. Ainsi, pour un pays comme la France,le dernier
Rapport sur l'état de l'environnement de l'Institutfrançais
de l'environnement pour la période 19982001(IFEN,
2002), indique que la pression sur les territoires, lesmilieux
et les écosystèmes se sont significativementaccrues
durant ces trois années. Il s'avère queles quantités
de déchets et les émissionsde gaz carbonique continuent
de croître au même rythmeque la consommation.
En définitive, depuis lesommet
de Rio et la médiatisation croissante de la notionde développement
durable, l'environnement a continuéà se dégrader
et la pauvreté, au niveau mondial,n'a finalement que très
peu reculé. Bjorn Lomborg(2001), un ancien militant de
Greenpeace en est venu àmettre en question ces conclusions
des environnementalistes. Danssa critique systématique
des discours sur l'environnement,il conteste la réalité
des périls dénoncéspar les environnementalistes,
que ce soit la surpopulation, lespesticides, l'effet de serre,
l'épuisement des ressourcesfossiles, etc.
Cette critique a un aspect certainementsalutaire
: le souci de l'environnement peut aisément verserdans
le millénarisme et les prévisions alarmantesont
certainement besoin d'être contrôlées etrigoureusement
évaluées. Mais en même temps,en lisant ces
critiques, on ne peut s'empêcher de penseraux problèmes
traditionnels de la méthodologie dessciences. Celle-ci
a bien mis en évidence qu'il est impossiblede prouver qu'une
proposition est « vraie » tandisque l'on peut plus
facilement démontrer qu'une propositionest « fausse
». Fort de ses compétences enstatistique, Lomborg
s'en donne à cur joie de démonterles « preuves
» avancées par les environnementalistes.Mais en dénonçant
leurs erreurs, il a lui mêmetendance à passer de
la réfutation (non, tout neva pas aussi mal que le prétendent
que les environnementalistes!) à l'affirmation, elle même
impossible àdémontrer, que tout va mieux qu'hier
et moins bien quedemain.
Par ailleurs, le courant environnementalisten'est
peut-être pas pour rien dans les raisons de l'optimismede
Lomborg : ainsi, dans le cas du trou d'ozone, n'est-ce pasla mise
en évidence du phénomène et le rôlequ'y
jouent certains gaz qui a provoqué une limitationde leur
usage et l'amélioration possible de la situation? Les économistes
ont plusieurs fois relevé l'existencede prophéties
auto-réalisatrices. Peut-êtrefaut-il porter au crédit
de ceux qui ont fait connaîtredes prévisions alarmantes,
par exemple en matièrede population, que les hypothèses
hautes ne semblent «heureusement » pas se réaliser.
Hegel remarquaitque « l'oiseau de Minerve la philosophie,
la science ne prend son vol qu'au crépuscule »...
Ces remarques soulignent que cen'est
pas dévaloriser la science que de conclure que lesdécisions
en matière d'environnement ne peuventêtre remises
entre les mains des seuls experts. C'est d'ailleurslà une
des expli-cations de l'échec du « contrat»
signé à Rio; document qui n'a étérespecté
sur aucun de ses deux volets. Parmi les raisonsde cet échec,
il y a très certainement la difficultéde définir
des politiques environnementales et socialescohérentes,
de les faire accepter et appliquer par lespopulations et les milieux
industriels, mais aussi de construireun nouveau lien institu-tionnel
entre tous les acteurs du développementdurable. En effet,
ce dernier repose sur la participation de l'ensembledes acteurs
de la société civile. Le processus décisionnelchange
alors de dimension.
Environnementet
gouvernance
La question de la forme de gouvernancese
pose donc avec une forte acuité. La gouvernance estun concept,
à l'origine économique, qui apparaîtdans les
travaux de Coase en 1937. Il désigne alors l'ensembledes
dispositifs de coordination interne à une entreprisequi
lui permettent d'organiser efficacement certains échanges:
c'est le gouvernement d'entreprise ou corporate governance.
De façon générale,la
gouvernance désigne l'ensemble des relations de pouvoirau
sein d'une société, ainsi que les modes d'arbitrageentre
les différents détenteurs de pouvoirs. Legouvernement
désigne l'exercice du pouvoir politique surune communauté
d'individus et, par extension, le pouvoirqui dirige un État.
Le gouvernement n'est donc qu'un desacteurs de la gouvernance.
Si la question de la gestion desaffaires
publiques se déplace aujourd'hui du gouvernementvers la
gouvernance, c'est parce que les gouvernements sont deplus en
plus contraints, dans leur action, par l'influence d'autresacteurs
(États étrangers, organisations supranationalescomme
l'Union européenne, entreprises, milieux associatifs,etc.).
Ils ne peuvent pas définir et appliquer seuls lesrègles
qui conduisent les individus et les groupes sociaux.La gouvernance
désigne précisément les mécanismesd'élaboration
et de contrôle de ces règles(Lerin, 1997).
La gouvernance au service du développementdurable
a un contenu original. En imposant une transformationdes formes
de la décision et de l'action publique ainsique des institutions,
elle contient une éthique des comportements(lutte contre
la corruption ou contre la délinquance écologique,transparence...)
et de la précaution dans les actions àentreprendre,
et elle favorise les partenariats garants de l'intégrationdes
dimensions sociales et environnementales. Concrètement,c'est
un processus décisionnel continu et coopératifentre
des acteurs ayant des intérêts différents,voire
conflictuels.
Un exemple de gouvernance appliquéeau
développement durable est celui lié aux négociationsinternationales
autour du changement climatique. A la suite dela convention sur
le changement climatique signé en 1992à Rio, les
États les plus riches se sont engagésà ramener,
au plus tard en l'an 2000, leur émissionde gaz à
effet de serre à leur niveau de 1990. Endécembre
1997, cette convention a été complétéepar
le protocole de Kyoto. Ce dernier, plus contraignant, imposeaux
pays industrialisés de réduire, d'ici 2012,leurs
émissions d'au moins 5% par rapport à leurniveau
de 1990. Ce n'est qu'en novembre 2001, à Marrakech,que
les pays signataires du protocole sont parvenus à unaccord
sur les modalités d'application permettant de lerendre
enfin opérationnel. Par conséquent, le choixet la
mise en uvre effective des politiques et instruments relèventessentiellement
d'un processus politique et font l'objet de négociationsentre
l'ensemble des acteurs. Une validation de ce choix par lesdifférents
acteurs, sous la forme d'un consensus ou d'unarbitrage conflictuel
entre eux, s'avère nécessairepour assurer sa légitimité
et éviter lesconflits concernant son interprétation
et son utilisation.Par ailleurs, les politiques, mesures et instruments
qui serontretenus lors des différentes phases du processus
de négociationsont par nature évolutifs. La pertinence
d'une négociationest donc établie dans le contexte
des projets et des préoccupationsd'une société,
voire dans le contexte d'un projetde société.
Il s'avère donc qu'une «bonne
» gouvernance est indispensable pour un développementdurable.
L'exercice n'est pas facile, car il suppose de trouverles «
justes » niveaux d'expression, de diversifierles formes
de décision et d'encourager la démocratieparticipative,
de délivrer une information transparenteglobale et solide,
de constituer un dialogue libre et constructif,de multiplier les
partenariats, de favoriser la transversalité,de croiser
les logiques et pratiques sectorielles, de développerdes
procédures d'évaluation continue collectiveset contradictoires
Le Programme des Nations-Unies pour le développementdonne
la définition « normative » suivante: «
La gouvernance peut être considéréecomme l'exercice
des pouvoirs économique, politique etadministratif pour
gérer les affaires des pays àtous les niveaux. Elle
comprend les mécanismes, procédéset institutions
(...). La bonne gouvernance est (...) participative,transparente
et responsable. Elle est aussi efficace et équitable.La
bonne gouvernance assure que les priorités politiques,sociales
et économiques sont fondées sur un largeconsensus
dans la société et que les voix des pluspauvres
et des plus vulnérables sont au cur du processusde décision
sur l'allocation des ressources pour le développement»
(PNUD, 1997).
La mise en place d'un tel systèmeparaît
d'autant plus nécessaire que l'État,en particulier
dans les pays industrialisés, aprèsavoir reçu
implicitement de la communauté qu'ilreprésente un
mandat pour protéger l'environnement,semble déléguer
à son tour cette charge àl'entreprise et/ou aux
organisations non gouvernementales. Cesouhait de fonder un développement
durable sur le volontariatdes entreprises plutôt que sur
des politiques environnementalespubliques est une tendance lourde.
Par exemple, dans le cadrede la préparation du Sommet mondial
pour le développementdurable qui a eu lieu à Johannesburg
du 26 août au4 septembre 2002, les Nations-Unies, dans les
documents préparatoires,ont mis l'accent sur les alliances
entre le secteur public etle secteur privé. Pour les experts,
ces alliances constitueraientun vecteur puissant de création
de capacités, detransferts de technologie et une passerelle
entre l'aide publiqueau développement et les investissements
étrangersdirects. En effet, en présence d'incertitudes
fortes dansl'avenir sur les conventions environnementales, un
élémentclé de la coordination économique
est l'interventionde partenariats collectifs pour offrir des connaissances
et visionsdu monde communes et de nouvelles normes de comportement
ayantun effet de légitimation d'une orientation ou d'une
préoccupationdonnée.
Dans ce contexte très connoté,la
définition d'une « bonne » gouvernance estd'autant
plus importante qu'il est difficile de faire l'hypothèseque
les évolutions dans les comportements publics, lesrégulations
environnementales ou les pratiques stratégiquesdes firmes
satisferont automatiquement aux conditions de durabilitééconomique,
sociale et écologique. Par exemple,de nombreux débats
à propos de la pertinence despolitiques de développement
durable concernent les potentialitésdu changement technologique
à réduire les émissionspolluantes et à
susciter un usage efficient des ressourcesnaturelles. La contribution
du changement technologique àla diminution de l'intensité
environnementale des produits,des processus de production et des
services est primordiale, mêmesi tout progrès réalisé
dans le domaine del'éco-efficacité peut être
compensépar un effet de rebond (Binswanger, 2001). Or les
grands groupesindustriels sont en position d'influencer la direction
de l'innovationtechnologique environnementale. De même,
s'il est courantd'avancer le principe de précaution pour
les décisionscomportant des risques environnementaux, la
contrepartie de sonapplication s'apparente souvent à un
gel quasi-irréversibledes positions concurrentielles en
matière technologiqueacquises au moment de la décision.
Cette situation peutfavoriser des comportements stratégiques
de la part desdifférents acteurs, en l'occurrence des firmes,
afin d'orienterla décision finale dans le sens de leur
intérêt.Les nouvelles formes de gouvernance doivent
alors garantir laprise en compte de responsabilités sociales
plus largesdans la recherche de stratégies de type «
win-win» (Faucheux., Nicolaï, 1998).
En somme, les réflexionssur
les modes de gouvernance au service d'un développementdurable
induisent de nouvelles méthodologies inhérentesà
l'élaboration des normes, des réglementations,des
mesures économiques et d'aide à la décision.Elles
conduisent à mettre en uvre des systèmes d'apprentissagecollectif
basés sur des processus consultatifs et participatifs.L'interaction
au sein de ces dispositifs engendre une légitimitédes
mesures environnementales retenues. Par exemple, le récentdéveloppement
de certains instruments de protection del'environnement tels que
les engagements volontaires ou les écolabélisations,souligne
l'évolution du cadre institutionnel des politiquesenvironnementales.
Cette tendance croissante à réunirdes parties prenantes
hétérogènes revientainsi à réaffirmer
les principes du développementdurable.
Développementdurable,
culture et gouvernance
Le renouvellement des ressourcesa
une dimension culturelle évidente dès lors quel'on
définit assez largement le domaine de la culture.Les ressources
culturelles incluent, par exemple, les sites, lespaysages, les
monuments, les objets et les documents associésaux activités
humaines présentes et passées.Elles ont aussi un
aspect immatériel comme les mythes,les idées, les
normes sociales, la langue que chaque générationreçoit,
enrichit et transmet. La plupart des ressourcesculturelles sont
uniques et non renouvelables. Elles sont apparuesou ont été
délibérément crééesdans des
lieux particuliers, à des dates déterminées,par
des individus donnés.
La durabilité relative àl'environnement
et à la préservation des ressourcesculturelles sont
donc largement complémentaires : les valeursculturelles
et l'histoire des populations représententdes adaptations
ou des réponses à l'environnement.La préservation
de la biodiversité et la préservationdes langues
moins diffusées sont deux versants d'une mêmeprotection
des dangers qui pourraient naître d'une réductiondes
espèces et d'une uniformisation des modes de vie etdes
langages. C'est là un souci qui anime les défenseursdes
« peuples premiers » et que partagent tous ceuxqui
se préoccupent desdimensions
territoriales et culturelles du développementdurable.
Aux côtés de la cultureet
de ses déclinaisons matérielles et spirituelles,l'espace
constitue certainement une dimension fondamentale desprocessus
orientant le développement durable. Le choixdes outils
d'aide à la décision et des moyens àmettre
en uvre peuvent changer selon l'entité spatialeconsidérée.
Les dimensions locale, régionaleou nationale du développement
contiennent différentesfacettes de la préservation
de la qualité de l'environnement,de la nécessité
de diminuer la production de déchetsou encore des modalités
de gestion des ressources naturellesmulti-fonctions.
Sur ce point, l'eau est un exemplede
ressource qui, du fait de cette particularité, nécessiteune
approche spatialisée. Sa multi-fonctionnalitése
décline à travers les différents services,marchands
ou non, qu'elle procure : épuration et recyclage(dilution,
auto-épuration), énergie motrice, alimentationen
eau potable, alimentation hydrique de la végétation,récréatifs...
Dans le cas de la France, par exemple,le législateur a
introduit des outils de gestion et deplanification de l'eau adaptés
à des niveaux d'approchedistincts : création des
sdage (Schémas Directeursd'Aménagement et de Gestion
des Eaux) au niveau des bassinshydrographiques (niveau global)
et des sage (Schémas d'Aménagementet de Gestion
des Eaux) au niveau des sous-bassins (niveau local).Dans le cadre
d'un sage, les acteurs impliqués dans saprotection et sa
gestion relèvent des collectivitésterritoriales,
des services de l'État, et des usagers del'eau dans le
cadre d'une commission locale de l'eau. Par conséquent,avec
la loi surl'eau
du 3 janvier 1992 (modifiée), le cadre spatialet temporel
considéré traduit une approche intégréede
la ressource où les milieux naturels (écosystèmes)et
leur fonctionnement sont pris en compte (bassins hydrographique,cycle
de l'eau). La ressource fait alors l'objet d'une approchepatrimoniale
au centre de laquelle figurent la préservationdes écosystèmes,
la protection contre les pollutions,la restauration de la qualité
de l'eau, la valorisationéconomique de cette dernière,
ainsi que sa répartitionentre différents usages
concurrents (Ferrari, Point, 2002).
Dans ce contexte, les formes de gouvernance guidant le développementdurable
sont nécessairement liées à l'histoiredes
populations concernées, à leurs pratiques culturelleset
à l'espace qu'elles occupent à un moment donné.
Alors que le Sommet de Johannesburg(août-septembre
2002) présente un bilan en demi-teintedes efforts déployés
depuis celui de Rio, la nécessitéde poursuivre la
réflexion sur les multiples dimensionsde la gouvernance
est plus que jamais d'actualité. Le présentnuméro
de Sciences de la Société a précisémentpour
objet d'étudier, entre autres, différents problèmesd'ordre
institutionnel ayant trait directement ou indirectementaux formes
de gouvernance adaptées au développementdurable.
A partir d'approches tantôt disciplinaires, tantôttransversales,
il s'intéresse notamment aux modalitésparticipatives
impliquant les acteurs dans les politiques de développementdurable
appliquées à l'échelle d'une région(variété
des exploitations agricoles et développementrural, rôle
du territoire rural dans la dynamique de développement...),d'un
secteur d'activité (rôle de la multifonctionnalitéde
l'agriculture) ou encore d'une ressource naturelle (l'eau).
©Sciences
de la Société n° 57 - octobre 2002
Références bibliographiques
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Jean-Alain
HERAUD, René KAHN,
L'actionéconomique des
collectivités entre développementendogène
et exogène
Résumé
L'actionéconomique
décentralisée est trèsrépandue, mais
son évaluation pose de nombreux problèmes.Dans le
cadre de cet article, nous nous emploierons à évalueret
à comparer les deux principales stratégies dedéveloppement
régional : endogène (de soutienà l'innovation)
et exogène (prospection des IDIet implantations d'entreprises)
à la lumière descontraintes posées par le
concept de développementdurable, lequel apparaît
comme une grille pertinente d'évaluationdes politiques
publiques régionales. Les initiatives localesde développement
endogène et exogène sont-elleséquivalentes
quant à leurs effets sur les trajectoiresde développement
régional ? La décentralisationdes politiques économiques
est-elle compatible avec lesexigences du développement
durable ? Des réponsess'appuyant sur la littérature
scientifique et des donnéesstatistiques sont esquissées.
Mots-clés:
développement régional, investissement directinternational,
politique d'innovation, développement durable
Philippe
ROBERT-DEMONTROND,
Clauses, normes et chartes sociales.
Principes etenjeux de nouvelles règles du jeu concurrentiel
Résumé
La questionde
la soutenabilité (durabilité, viabilité)du
développement économique s'impose depuis quelquesannées
comme une nouvelle priorité dans l'agendadécisionnel
des entreprises, appelées à plusde « responsabilité
» en matière dedonnées environnementales et
sociales. Dans ce cadre d'idées,il s'agit ici d'examiner
dans leurs grands traits les principeset les limites des différents
systèmes de régulationsociale de l'activité
des entreprises.
Mots-clés:
développement soutenable, responsabilité sociale,clauses
sociales, normes sociales,codes de conduite.
GéraldineFROGER,
Pascal OBERTI,Gouvernance
et développement durable. L'aide multicritèreà
la décision participative
Résumé
Le succès d'un développementdurable
est conditionné par une réelle implicationdes acteurs
socio-économiques aux processus de décisions.D'où
l'intérêt d'adapter et/ou d'utilisercertains développements
récents de la rechercheopérationnelle moderne pouvant
favoriser la participationau sein desdits processus. Cet article
étudie tout d'abordles raisons amenant les pouvoirs publics
et les autres acteursà souligner l'importance de la participation
et àdéfinir ce que nous qualifions d'aide multicritèreà
la décision participative. Ce type d'approchesera ensuite
étayé sous l'angle de sa mise en uvrefondée
tant sur des considérations méthodologiquesque sur
une véritable application à l'échelonrégional.
Une telle démarche multicritèreillustrera les enjeux
de gouvernance en matière de développementdurable.
Mots-clés : développementdurable,
gouvernance, analyse multicritère, processus,participation,
évaluation, décision.
Muriel
MAILLEFERT,
État,action publique et territoire.
Quels enjeux pour la politiqued'emploi territoriale ?
Résumé
Depuis une vingtaine d'annéesse
développent des critiques de l'État et de sescapacités
régulatrices. En matière de politiqued'emploi, ces
critiques se traduisent par la mise en place d'unestratégie
de territorialisation. Celle-ci comporte deuxvolets distincts.
Le premier concerne une démarche de déconcentrationde
l'action publique qui vise à améliorer l'adaptationdes
moyens de la politique d'emploi aux réalitéslocales
et aux besoins des publics. Le second a comme objectifl'appui
de mesures décidées localement par la participationaux
volets emplois des différentes initiatives territorialestelles
que les contrats de ville, de pays ou d'agglomération.La
place et le rôle de l'échelon territorial sontdans
l'un et l'autre cas très différents. Dans lepremier,
la logique de déconcentration prédomine,alors que
dans le second émerge une nouvelle forme d'actionpublique
fondée sur une plus grande autonomie des acteurslocaux.
Toutefois le développement d'une véritabledimension
horizontale de l'action publique est handicapépar la confusion
entre deux formes d'intervention : les actionsen faveur de l'emploi
et la politique d'emploi.
Mots-clés : politiqued'emploi,
territoire, action publique.
André
TORRE, Armelle CARON,
Conflitsd'usages et de voisinage
dans les espaces ruraux
Résumé
Les grandes mutations socialeset
culturelles des trente dernières années ont contribuéà
transformer les fonctions du rural. Aujourd'hui, cettecatégorie
d'espace sert de support à quatre fonctionsprincipales
: économique (production, tourisme), résidentielle(habitat),
écologique (conservation du patrimoine naturel,protection
contre les inondations,) et culturelle (conservationdu patrimoine
rural). Ces fonctionnalités multiples, quiinduisent des
modalités d'usages parfois concurrentes,sont régulièrement
sources de tensions et de conflitsentre les usagers des espaces
ruraux. On s'intéresse iciaux modalités de résolution
des conflits exprimés,déclarés ou latents,
en combinant des approchesen termes de proximité, puis
de droits d'usages et de propriété.Après
avoir proposé une typologie distinguant deuxsources de
conflits, on examine les modalités de résolutiontraditionnellement
présentées dans la littérature.Cette catégorisation
enrichit la réflexion sur laproximité organisée,
appréhendée commevecteur ou mode d'incitation à
l'émergence de solutionscoopératives Dans cette
perspective, le recours àune juridiction peut être
perçu comme la sanctionde l'échec de la solution
de proximité négociée.
Mots-clés : conflits,tensions,
usages, droits d'usage, utilisations du sol, voisinage.
Corinne
MEUNIER, Dominique VOLLET,
Stratégies d'acteurset efficacité des politiques
publiques territoriales. Lecas des CTE dans la région Auvergne
(France)
Résumé
L'appréciation de l'impactd'une
politique territoriale peut difficilement être menéeà
bien sans une prise en compte des stratégies d'acteurset
des modalités de leurs interactions. L'article s'appuiesur
l'évaluation des cte dans la région Auvergne,qui
a donné lieu à près de quatre-vingt enquêtesauprès
d'exploitants agricoles (ayant ou non contractualiséun
CTE) situés dans quatre territoires. L'analyse des mécanismesde
coordinations entre acteurs révèle l'importancedes
processus d'apprentissage pour expliquer l'efficacitéde
la politique publique. En fait, celle-ci montre que le CTEs'appuie
sur les dynamiques territoriales existantes sans parveniren en
créer de nouvelles.
Mots-clés : évaluation,acteurs,
coordination, apprentissage, interactions, CTE, multifonctionnalité
LaurentGRIMAL, Chariloas
KEPHALIACOS, Patrice ROBIN,
Questionsthéoriques autour
de l'efficacité environnementaledes contrats territoriaux
d'exploitation
Résumé
La loid'orientation
agricole de 1999 introduit un nouveau dispositif,le contrat territorial
d'exploitation (CTE) qui vise des objectifséconomiques,
sociaux et environnementaux. Ce texte proposeun cadre théorique
pour traiter la question de l'efficacitéenvironnementale
des CTE. Les caractéristiques propresaux CTE et le contexte
institutionnel dans lequel ils se mettenten place conduisent à
privilégier une analyse reposantsur deux démarches
complémentaires. La première,à savoir l'économie
néo-institutionnaliste,considère que les changements
s'opérant àtravers la production exogène
et endogène de règleset d'institutions se traduisent
par une réaffectation desdroits de propriété
entre les acteurs économiques.La seconde, au moyen des
outils proposés par l'économieécologique,
permet d'appréhender le type de changementstechniques visant
la gestion durable de l'environnement qui devrontêtre induits
par les CTE.
Mots-clés:
contrat territorial d'exploitation, économie néo-institutionnelle,économie
écologique, externalités, droitde propriété.
LourdesVILADOMIU,
Jordi ROSELL, Gemma FRANCÈS,
Ladiversification des exploitations
agricoles et leur contributionau développement rural. Le
cas de la Catalogne
Résumé
En Catalogne, malgréla
tendance à la spécialisation dans le secteuragricole,
un nombre important d'exploitations présententune remarquable
diversification de la production, aussi bien agricoleque non agricole.
Cet article analyse la diversification selonquatre modalités
: diversification de la production agricole,diversification traditionnelle,
production et services non agricoleset pratiques environnementales
et nouvelles méthodes deproduction. Basés sur cette
typologie, les résultatsd'une enquête réalisée
auprès de 85exploitations diversifiées sont analysés
pour connaîtreles raisons et l'impact de la diversification.
Finalement, nousconcluons l'article par quelques remarques.
Mots-clés : exploitationagraire,
diversification d'activités, développementrural.
MichelBLANC, Eric
CAHUZAC, Gabriel TAHAR,Externalités d'agglomérationet flux
de main d'oeuvre
Résumé
Plus l'agglomérationest
grande, plus les entreprises ont des chances de trouver surle
marché un individu correspondant exactement aux exigencesd'un
poste de travail vacant et plus un salarié àla recherche
d'emploi a de chances de trouver une offre d'emploicorrespondant
à ses compétences. En conséquence,toutes
choses égales par ailleurs, les entreprises devraientrecourir
davantage au marché externe dans les grandes agglomérationsque
dans les zones rurales. Pour tester cette hypothèsenous
avons utilisé les résultats d'une enquêtemenée
dans la région Midi-Pyrénéesauprès
d'un échantillon de 1500 entreprises. Onmontre, à
partir d'une régression où lesentrées et
les départs de salariés d'uneentreprise sont modélisés
selon un processus poisonnien,que les entreprises rurales enregistrent
moins de départset moins d'embauches que leurs homologues
urbaines. Cela traduitune plus grande stabilité des emplois
: les appariementssont plus stables et les effectifs moins variables
au cours dutemps. Ce phénomène est particulièrementmarqué
dans les petites entreprises.
Mots-clés : marchédu
travail, agglomération, embauches, zones rurales.